Et si 2018 était l’année des films en VR

Publié le 02/01/2018


 

 

Et si 2018 était l’année des films  en VR

 

La réalité virtuelle, un nouveau média expérientiel.  Sous la plume de Clément Apap  : « Elle se vit plus qu’elle ne s’explique… En ce sens, elle partage l’une des caractéristiques mêmes de la vie. »

Mes 9 premières expériences sensorielles de films VR

A l’occasion du festival  Paris Courts Devant- Ile de de France tenu en novembre à la BNF, j’ai pu « vivre » la sélection des 9 films VR en compétition. Ces films venus de nombreux pays ont été produit dans les deux dernières années. Leur durée allait de 5 à 15 minutes.

 

J’espère vous montrer la richesse actuelle des histoires imaginaires comme documentaires que nous propose une écriture en Réalité Virtuelle immersive casquée.

Mon goût pour un cinéma réaliste  m’a poussé commencer par un documentaire produit par la BBC

POISONED GROUND

NAMAK KHOSHNAW - ROYAUME-UNI

Début avril 2017, le gouvernement irakien a annoncé que les pompiers avaient éteint le dernier des puits de pétrole autour de Qaayarah. Bien que les flammes soient maintenant éteintes, le paysage reste fortement pollué.

 

Première grosse surprise en voyant les 5 minutes de ce reportage, on peut faire du montage en VR puisque qu’il y a au moins une trentaine de plan ; dans la durée choisie par le réalisateur, chaque plan est un plan séquence proposant un espace à 360° que j’explore selon mon désir de l’instant. Des enfants tournent autour de moi (intrigués par la camera) mais je peux  incliner mon regard  sur le cratère noir et dévasté de l’ancien puit en train d’être décontaminé avec des grues géantes. Quelques plans plus tard, je me retrouve dans la rue d’une ville proche du puit et dans un autre plan je suis dans une boutique de vendeur de portables qui raconte l’état de pollution subie. Si je regarde devant moi l’homme apparait dans un rapport d’échelle satisfaisant pour ma perspective habituelle, si je vise le sol de la boutique longeant la vitrine-comptoir lorsque j’abouti sur lui, je perds le sentiment de réalité car le plancher de carrelage semble s’enfoncer en profondeur !

 

IF YOU GO AWAY

SOHEILA GOLESTANI  - IRAN

C’est la guerre, un couple doit immigrer vers Utopia. Des conditions difficiles les séparent les uns des autres, mais la jeune femme se bat pour leur destin.

 

 

L’Iran m’attire en second à la fois pour le sujet et pour son beau présent de cinéma. Je suis sur le bateau qui se charge de femmes et s’éloigne peu à peu du rivage. J’ai loisir de regarder la côte où les hommes sont en train de rester ou d’explorer derrière moi (en me tournant sur la chaise pivotant qui m’a accueillie et en usant de la rotation de mon cou) les visages du groupe de femmes qui ont embarquées dont je fais corps (et âme ?) avec elles. Et puis l’une d’entre elle se jette à l’eau ! Que regarder ? La nageuse et les hommes au loin qui réagissent ou les visages des femmes à bord qui par leurs expressions non verbales comme par leurs paroles expriment un mélange d’espoir et de crainte ? Sur ma chaise un 180° de direction de regard !

SUPERSTAR VR

STEVEN WOUTERLOOD - PAYS-BAS

Quelle sensation cela fait d’être une superstar ? Vivez une journée hors de votre vie en tant que DJ de renommée mondiale. Ressentez la gloire !

Après ses sensations très réalistes, en choisissant Superstar VR je pense  poursuivre le même chemin sensoriel. Dès le premier plan je suis captivé et captif dans cette limousine ou outre moi, sont assis une jolie assistante et au fond un manager peu bavard. L’assistante récapitule à mon attention les nombreux rendez-vous de ma journée jusqu’au concert du soir. Tout semble à nouveau réaliste et par la suite la sensation perdurera à ceci près que les femmes et les homes qui vont apparaitre dans ma vision pendant les 15 minutes, sont dans une échelle  elle les fait apparaitre semblable à la taille des poupées Barbie ou des figurines Mokarex de mon enfance !

 

VAIN : THIS PARTY SUCKS

MAGGIE F. LEVIN - ETATS-UNIS

Une rave party dans un entrepôt sert de snack coloré à des vampires affamés.

Continuant dans le divertissement et sans avoir lu le pitch, je participe de cette rave party aux couleurs psychédéliques. Cette fois l’image des participants est vécu comme légèrement agrandi comme les créatures d’Avatar. Tout le monde parle en même temps, il y a bien dans cet espace une vingtaine de personnes qui s’agitent, parlent, dansent….jusqu’à se faire mordre au sang par les deux ou trois qui ont les dents longues et qui n’aspirent qu’à ça !

 

PROXIMA

MATHIEU PRADAT  - FRANCE

Une petite lueur vibre dans l’obscurité comme une étoile. Elle vient à la rencontre d’un homme et repart. Il la suit. A chaque fois qu’il pense l’atteindre, elle se dérobe, et l’entraîne un peu plus loin. Va-t-il atteindre l’infini s’il l’attrape ?

Voilà un pitch qui ne dit rien de ce que l’on va vivre…ou du moins pas grand-chose. La tendance lorsque le film débute est de regarder devant soi. Et là circulez, il y a peu à voir, une sorte de ténèbres…alors on incline la tête et OH ! Surprise on découvre sous soi, dans une plongée verticale, un homme tout nu dans une baignoire entourée d’obscurité. L’homme semble à l’étroit dans la baignoire. Il tend les bras vers une source lumineuse (ici on rejoint le pitch !) et l’on va voyager avec lui sans aucun repère d’échelle jusqu’à ce que la lumière guide passe par un trou de serrure vers une pièce plus éclairée…mais je ne vous dis pas la suite !

HERE AND THERE

KIRYL HALITSKY - BIÉLORUSSIE

Un auteur qui vit parmi des barricades de livres et de magazines. Il est à la recherche de la bonne histoire, mais devra surmonter la résistance de ses personnages.

 

Après ce film  allégorique réalisé par un français, j’ai eu envie d’explorer la vision d’un réalisateur des anciens pays de l’EST. Au regard des écoles de cinéma Russe et Polonaise, je pouvais m’attendre à un mélange de cérébral et d’émotionnel dans le traitement en réalité virtuelle. Je ne fus pas trompé car d’emblée on est confronté à un décor semblable à une scène de théâtre (à moins qu’il s’agisse du cerveau de l’auteur) avec des éclairages contrastés  semblant proposer deux ou trois lieus : là où l’auteur écrit, un autre ou il imagine ce qu’il écrit et des personnages qui trivialement nettoient ces lieus. Cette fois ci je n’ai pas eu vraiment envie de voir derrière moi ce qui pouvait s’y passer, tellement les actions dans les trois lieux ou activités décrites ci-dessus jouaient de façon synergique. Mon attention était captée comme dans une écriture pour un film 2D. Ici pas de réalisme au sens strict puisque le réalisateur use d’image figeant l’action sur l’un des lieus à un moment ou à un autre. Il va même sur un personnage figé au sol, à le faire soulever la tête par la femme de ménage qui passe l’aspirateur ! Pour clore le film, de la machine à écrire jaillira en feu d’artifice les lettres qui viendront tapisser le sol. Beau, très beau spectacle mais peut-être pas le vécu le plus expérientiel de VR

 

PLANETSIGMAI

MOMOKO SETO  - FRANCE

Dans un monde en ruines, seuls les champignons et les moisissures poussent au milieu de gigantesques corps d’insectes séchés. Un changement climatique se produit, et de l’eau de pluie jaillit un écosystème peuplé de têtards carnivores géants.

Entre le pitch du programme et celui  d’Arte qui a produit ce film on voit  l’écart important de mise en conditions du spectateur fut-il casqué :

« Il y a 2,2 milliards d'années, la Terre s'est entièrement recouverte de glace, la température moyenne atteignait -50°C en surface et les volcans sous-marins perpétuaient son activité…. »

Pour ma part j’ai plus ressenti le froid et je n’ai pas vraiment voulu vivre et explorer cet univers. La réalisatrice Franco-Japonaise utilise toutes les ressources de la conception graphique des images de synthèse 3D, mais point d’émotion pour moi. Son film est néanmoins celui que le jury de la compétition à primer

FRENCH KISS

PASCAL TIRILLY - FRANCE

Une porte s’ouvre devant vous, révélant le chaleureux café d’un théâtre parisien. Assis à une table, vous observez les gens qui vous entourent avant que le spectacle commence. Approchez-vous et glissez-vous dans leurs histoires intimes et personnelles.

 

 

Ce film en fait était le seul à proposer une interactivité. Je pouvais choisir  à tout moment de me rapprocher d’une des tables et suivre les conversations à la bonne distance émotionnelle. En tournant à droite ou à gauche  je pouvais voir dans la perspective visuelle et sonore l’un des autres couples ! Rentrée à la CST lors des réflexions du groupe Multimédia, je voyais 20 ans plus tard enfin quelque chose de convaincant pour le mot Interactivité.

Longue Vie à la VR qui cependant cohabitera avec l’expression cinématographique sur écran 2D !

Dominique Bloch